L’église d’ Arka  Pana,  la victoire de la Croix

Publié le

En ce lendemain du 1er mai, alors que la célébration de cette fête des travailleurs vient de connaître de nombreuses scènes de violence, nous vous invitons à découvrir l’histoire de l’église Notre Dame, Reine de Pologne (connue également sous le nom de Arka Pana) et le message qu’elle nous transmet.

Nowa Huta : une ville pour propager l’idéologie communiste

En 1946, Staline propose à Boleslaw Bierut, président de la république de Pologne qui plus tard deviendra le premier secrétaire du parti ouvrier unifié polonais, la construction d’une grande usine métallurgique localisée près de Cracovie.

Celle-ci, grâce à la présence de l’université Jagellone, vieille de plus de 600 ans,  était alors le centre culturel et intellectuel de la Pologne.

Grâce à la construction de la fonderie, les dirigeants espéraient transformer cette cité universitaire en ville-modèle de travailleurs afin de propager l’idéologie communiste.

Les habitants de Nowa Huta devaient cesser de considérer le monde sous un angle catholique. Un journal de l’époque déclarait même que les citoyens devaient « être libérés du joug du clergé ». Ils étaient même encouragés à aimer le communisme pour que se forme « l’homme nouveau ».

La ville idéale selon le communisme

Le 17 mai 1947, nait officiellement le projet de la ville nouvelle de Nowa Huta (qui signifie Nouvelle Fonderie). Sa construction commence en 1949.

La ville doit abriter plus de 30 000 ouvriers. Ceux-ci iront travailler dans la nouvelle usine sidérurgique, l’aciérie Lénine.

Sa construction se fera entre 1950 et 1954 et elle sera inaugurée le 22 Juillet 1954.  Aujourd’hui l’usine s’appelle la Fonderie Tadeusz Sendsimir et appartient au groupe Arcelor Mittal.

Cette ville nouvelle possédait une immense place centrale. Son centre, de 1973 à 1989, était occupée par une énorme statue de Lénine.

De cette place partaient cinq larges avenues bordées d’arbres. Elles représentaient les cinq points de l’étoile rouge.

Des parcs, des lacs, un cinéma, un théâtre, des clubs sportifs, des bibliothèques et des écoles agrémentaient la ville. Cependant, malgré le confort des appartements, la majorité des habitants souffraient de la pollution de l’ usine et des dures conditions de travail qui avaient un impact sur la vie familiale.

Ils souffraient d’autant plus que la régime voulait faire de Nowa Huta, la première ville sans Dieu. Or, la population était composée, en grande partie, de paysans catholiques expulsés de leurs terres.

En effet, selon la logique communiste, les travailleurs, puisqu’ils avaient le parti, n’avaient plus besoin de Dieu.

Il n’y aurait donc pas d’église dans la ville nouvelle !

L’autorisation de la construction d’une église.

En 1956, après les manifestations de Poznań et la mort de Staline et de Bierut,  Władysław Gomułka, le nouveau secrétaire du parti, abandonne le stalinisme et promulgue quelques réformes.

À Nowa Huta, suite à la pugnacité des habitants, les autorités autorisent enfin, sur la place principale de la ville, la construction d’une église.

Forts de cette promesse, les habitants érigent, sur le site choisi, une imposante croix en bois.  Au pied de celle-ci, des temps de prière et des messes réunissent les habitants. L’endroit devient le cœur de la vie religieuse de la ville.

Cependant, malgré l’autorisation, aucun permis de construire est délivré. L’ église ne demeure qu’une vague promesse.

Pendant de nombreuses années, les citoyens continuent leur lutte afin d’obtenir le permis de construire. Mais les autorités ne tiennent pas leur engagement et décident de construire à une école où les valeurs marxistes seront enseignées.

Le 27 avril 1960, tôt le matin, des ouvriers, protégés par des gardes armés, se rendent à la croix de Nowa Huta afin de la démolir.

Un groupe de femmes, comprenant ce qui se passe, s’arment de balais et autres objets et préviennent les habitants.

Un peu plus tard, plus d’un millier d’hommes se mettent en marche vers la croix, avec des pelles, des pioches et d’autres outils et se rassemblent sur la place.

Malheureusement, après plusieurs heures, la protestation non violente se transforme en bataille de rue.

La défense de la Croix durera plusieurs jours et conduira à une dure répression. Certains se virent infliger des peines de prison et d’autres perdirent leur emploi.

Néanmoins, la croix demeura bien en vue dans « la cité sans Dieu ».

Karol Wojtyla et la nouvelle évangélisation

Après sa nomination en tant qu’évêque auxiliaire de Cracovie, Karol Wojtyla, avec son passé de travailleur et ses connaissances sur les fondements théoriques du communisme, joua un rôle important pour sauver la croix de Nowa Huta.

En effet, ordonné prêtre le 28 septembre 1958, il appuya, dès le début de son ministère, les efforts en vue de la construction d’un lieu de culte digne pour les ouvriers.

Après les événements survenus sur la place centrale, il protégea les victimes de la répression communiste et organisa, malgré le rude hiver polonais, des messes en plein air sous la croix.

En janvier 1964, le pape Paul VI, le nomma archevêque de Cracovie puis, en décembre 1965, trois jours après la conclusion du concile Vatican II, il remit à Karol Wojtyla une pierre prélevée sur la tombe de saint Pierre en lui disant : « Ramenez avec vous cette pierre en Pologne. Et puisse l’église de Nowa Huta être construite à partir d’elle ».

Grâce à la persévérance inébranlable des catholiques de la ville, l’ église de Nowa Huta fut enfin construite, en 1977.

Sous le signe de la Croix

En juin 1979, au cours de son premier voyage apostolique dans sa Pologne natale, les autorités refusèrent à Jean-Paul II  la permission de se rendre à l’église de Nowa Huta.

Il célébra donc la messe au sanctuaire et monastère cistercien médiéval de Mogiła, un village situé à proximité. Fondé au 13e siècle, celui-ci jouissait d’une grande renommée car il abritait une relique de la Sainte Croix.

Dans son homélie le pape souligna : [ « que l’histoire de Nowa Huta fut écrite « sous le signe de la croix », d’abord sur celle antique de Mogiła puis sous le signe de celle installée plus récemment dans la cité. Il ajouta que, même si les temps changent et que la technologie fait des bonds prodigieux, « la vérité de la vie de l’esprit humain – qui s’exprime à travers la croix – ne connaît pas de déclin, elle est toujours actuelle et ne vieillit jamais »].

Puis il précisa que : «  Là où s’élève la croix, surgit le signe que la bonne nouvelle du salut de l’homme, grâce à l’amour, est arrivée jusque-là […]. Une nouvelle évangélisation est commencée… La croix domine le monde qui change ».

L’église d’Arka Pana et sa richesse symbolique

L’ église de Nowa Huta est particulière avec sur sa façade plus de deux millions de galets gris. A l’intérieur, des morceaux de bois évoquent la partie inférieure de la coque d’un bateau.

Au milieu se dresse une étonnante représentation du Christ en croix appelée « de Vie en Vie.

Ce Christ monumental nous rappelle la phrase biblique de saint Jean : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? » (Jn 11, 25-26).

Le toit a la forme d’un grand bateau et les murs inclinés représentent quatre voiles.

Sa forme et l’accumulation d’éléments ayant une signification symbolique se réfère à l’arche de Noé. L’église d’Arka Pana est donc le symbole du salut contre le programme d’athéisation du régime communiste.

Une couronne en acier dorée est posée sur la Croix (sorte de Mât en acier aux parois latérales inclinés). Elle rappelle le caractère marial de l’édifice et, le 15 mai 1977, le futur pape Jean-Paul II consacra l’église en lui donnant le nom de Notre Dame Reine de la Pologne.

Un appel au témoignage de la vie chrétienne

Aux yeux de Jean-Paul II, les événements de Nowa Huta rappelaient le devoir qu’avait l’Église de faire redécouvrir l’Évangile dans les sociétés chrétiennes, surtout celles qui avaient perdu le sens de Dieu au profit d’une laïcisation grandissante.

Aujourd’hui, dans notre société, la foi chrétienne, est de plus en plus marginalisée. La nouvelle évangélisation dépend donc de nos réactions aux problèmes qui se posent dans le monde ainsi que de notre volonté de prendre personnellement la « défense de la croix » dans les lieux où nous vivons.

Dans son encyclique Redemptoris Missio, Jean-Paul II nous rappelle que : « Première forme de la mission, le témoignage de la vie chrétienne est aussi irremplaçable » (42). Et il précise que celui-ci implique non seulement que nous prenions : « des positions courageuses et prophétiques » face à la corruption du pouvoir politique, mais aussi que nous pratiquions l’humilité en servant les plus pauvres, les faibles et les souffrants, « et en imitant la simplicité de la vie du Christ » (43).

Pour conclure 

La nouvelle évangélisation, malgré les difficultés et les exigences, est un appel à témoigner personnellement et en communauté de notre foi chrétienne.

Inspirés par saint Jean-Paul II et les habitants de Nowa Huta, nous devons nous aussi, dans un monde de plus en plus sécularisé, où Dieu n’a plus sa place, trouver le courage de prendre le parti de la croix et de la défendre avec nos armes : le service des plus déshérités, la charité et l’Amour.

   

   

Georgette

Sources : Le berceau de la Nouvelle Évangélisation  Krzysztof Mazur le 4-01-2014 et pdf arkapana folder_francuski.

Illustrations : Nowa Huta – Wikimédia Commons – Licence GNU – Libre de          Auteur : Wiktorp et Polish Wikipédia

Eglise d’Arka Pana :  photos des pèlerins

Plus de lecture...