Les sculptures de l’église Saint Hélier de Beuzeville (Eure)

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Le temps des vacances nous permet de faire de belles découvertes.

C’ est le cas de l’église Saint Hélier de Beuzeville. Celle-ci est un magnifique lieu de recueillement et de méditation.

Histoire de l’église

L’ édifice,  dédié à Saint Hélier (moine du 6eme siècle originaire de Tongres en Belgique qui devint ermite à Jersey et donna son nom à la principale ville de l’île), fut élevé au 12eme siècle. Par la suite, il fut remanié  au XVIe et au XVIIIe siècle.

L’ église, avant sa rénovation, représentait un exemple de dérives de l’art Sulpicien (les œuvres de ce style avaient pour but de susciter la dévotion). Elle contenait donc de nombreuses statues en plâtre de mauvais goût.

C’est pourquoi, au début des années 1960, le doyen de Beuzeville, amoureux des arts et notamment de l’art sacré, entreprit de lui redonner son authenticité.

Aussi lança-t-il un grand chantier de rénovation qui dura près de dix ans. Pour faire tomber les plâtres et les stucs qui recouvraient les murs de l’église, il fit appel à des bénévoles.

Aujourd’hui, la pierre nue des trois nefs et des deux chapelles apporte à cet édifice la beauté et la sérénité des cloîtres normands.

Les sculptures extérieures

L’église porte des gracieux fenestrages, des balustres et des gargouilles. Côté Est elle possède un beau colombage de style normand.

Les sculptures intérieures

Elles sont l’œuvre de Madame Josette Hébert-Coëffin et de Auguste Guénot.

Josette Hébert-Coëffin (1907-1973)

Elle suivit des études à l’école des beaux-arts de Rouen.  Elle y obtint, en 1922, un premier prix de sculpture et d’architecture.

Puis, en 1937, elle devint la première lauréate de la fondation John-Simon-Guffenheim à New York.

En outre, la même année, grâce à la création de modèles pour la manufacture nationale de Sèvres, elle reçut  une médaille d’or à l’Exposition universelle puis une autre de la Société d’encouragement pour l’industrie.

Enfin, elle fut élue membre correspondante de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen en 1938.

Ciselant dans la pierre de nombreuses œuvres religieuses d’une grande beauté, elle est connue sous le nom de l’imagier de Notre-Dame.

Ses statues

Notre Dame de Toutes Grâces.

Cette statue, d’une grande pureté de lignes, se situe au dessus de l’autel du transept nord.

Du visage de Marie se dégage bonté et douceur. Elle présente au monde l’Enfant Jésus qui, les bras en croix, annonce déjà la Rédemption.

La statue de Saint Joseph

Cette belle représentation le représente non pas comme un vieillard mais comme un homme jeune, dans la force de l’ âge. Elle se situe du côté sud.

Ses mains s’appuient tendrement sur les épaules de Jésus qui tend vers lui un visage confiant. Le charpentier de Nazareth l’enveloppe de son affection.

  

En la contemplant, nous pouvons méditer cette phrase de Fabrice Hadjadj : [« personne n’est plus radicalement père que Joseph ». D’ailleurs, son nom en hébreu signifie : « Il ajoutera » – «  Il fera croître »]. Aussi le nom de Joseph nous dit-il quelque chose de la fécondité et de l’autorité paternelles.

D’autre part, le cardinal Roger  Etchegaray, pour évoquer la paternité de Joseph écrivit : « … l’ artisan de Nazareth n’a pu devenir le père de Jésus qu’en étant lui-même une image du Père Céleste ». Aussi Jésus pouvait -il « contempler dans son père humain l’expression la plus parfaite de la paternité divine » .

Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.

Sur le même côté, Josette Hébert-Coëffin sculpta Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus sur un large bloc de pierre arrondi dont la base dessine des arabesques formant un nuage.

Agenouillée, les bras étendus et grands ouverts, elle se penche vers nous.

Sur le socle nous pouvons lire cette phrase :  «  Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre ».

Cette représentation nous rappelle que, dans les cloîtres, des religieux et religieuses vouent leur vie à la prière pour le salut de tous.

Auguste Guénot (1882 – 1966)

En 1895, à treize ans, il entre à l’École des beaux-arts. Jean Rivière avec son enseignement riche et moderne l’ y éduque à l’art de la sculpture.

Dès lors, le jeune Auguste excelle dans la taille sur bois. Il aime travailler le meuble. Néanmoins, il s’adonne aussi aux d’autres arts et, parmi eux, le dessin et la peinture qu’il pratiquera toute sa vie.

A la fin de ses études, en 1899, il se rend à Paris. Bien qu’ il n’ y intègre pas les Beaux-Arts, il y fait cependant la connaissance du sculpteur Joseph Bernard, adepte de la taille directe.

L’ homme intransigeant

Son caractère entier ne faisait pas bon ménage avec la diplomatie qu’exigent les rapports sociaux ou politiques.

En conséquence, ses relations professionnelles furent parfois difficiles car il était incapable de soumission devant la mode, la critique ou le marché de l’art.

Pour lui, les honneurs devaient être uniquement le résultat de son travail.

En 1932, il reçoit le titre de Chevalier de la Légion d’honneur. Par la suite, il obtiendra le grade d’Officier.

Puis, en 1947, l’ académie des Arts de Toulouse lui réserve un place de membre associé.

Enfin, en 1954, après le décès du sculpteur André Abbal il sera élu au siège de celui-ci.

Saint Antoine de Padou

C’ est à la suite d’une grande souffrance qu’il sculpta cette statue. Aussi le visage de Saint Antoine exprime-t-il une sorte de résignation mais aussi l’ abandon à la providence.

Le Christ au bâillon 

Par cette représentation du Christ, peu courante, Auguste Guénot voulu exprimer cette pensée  : « Que ceux qui ne veulent pas entendre la voix de Dieu, le bâillonne ».

Or, au sujet de la parole bâillonnée, Victor Hugo écrivit : «  La toute-puissance du mal n’a jamais abouti qu’à de efforts inutiles. La pensée échappe toujours à qui tente de l’étouffer… si l’on met un bâillon à la bouche qui parle, la parole se change en lumière, et l’on ne bâillonne pas la lumière ».  (Victor Hugo à Jersey).

Aussi, pour illustrer cette parole, Auguste Guénot sculpta-t-il son Christ au bâillon dans un bloc de calcaire. Ainsi, par sa luminosité, il attire le regard et nous interroge. Que faisons-nous de sa Parole !

Pour conclure

L’ église de Saint Hélier, outre ses statues, offre au regard d’autres merveilles.

Prochainement, nous découvrirons ses magnifiques vitraux.

Georgette

Sources : Dépliant de l’office de Tourisme communautaire de Honfleur sur l’église St Hélier – Artistes méridionnaux –

Fabrice Hadjadj : Etre père avec Saint Joseph – Cardinal Roger Etchegaray : J’avance comme un âne –

Illustrations : Photos Jean-Lucien G.

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