Le jardin d’Afrique à Zarzis

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Nous l’avons vu, le dialogue interreligieux est un appel de Dieu à la fraternité universelle. C’est ce que symbolise la grenade. En effet, ce fruit, à l’image de l’humanité, est divisé en plusieurs parois qui contiennent un très grand nombre de graines.

Dans l’Islam, elle représente le fruit du paradis et dans la religion chrétienne, la multiplicité dans l’unité.

Elle nous rappelle que le chemin qui mène à Dieu passe par l’Homme et, que le plus grand service que nous puissions faire à l’humanité, c’est de faire le bien.

Vivre un dialogue interreligieux constructif, c’est donc nous comporter en croyants crédibles, capables d’aimer et de servir tous les hommes (Extrait de questions et réponses sur l’Islam – d’après l’ouvrage le Prêtre et l’Imam aux Editions Bayard).

C’est ce dont nous parle ce lieu que nous vous invitons à découvrir.

Qu’est-ce que le Jardin d’Afrique à Zarzis

Le « jardin d’Afrique » à Zarzis (ville côtière du sud-est de la Tunisie, proche de la frontière libyenne), est un cimetière conçu par Rachid  Koraïchi. Cet  artiste algérien, croyant en Dieu mais aussi en la dignité de tout homme, a vendu  ses œuvres afin de réaliser un vrai lieu qui rendrait leur dignité à ces hommes, ces femmes et ces enfants qui trouvent la mort en fuyant la guerre ou l’extrême pauvreté, souvent même les deux.

Il rappelle qu’il est aussi un lieu de prière. Car,  si la  Méditerranée est le plus grand cimetière des temps modernes, on oublie que le désert du Sahara l’est aussi. « Savons-nous combien de désespérés sont enterrés dans ses sables et qui pleure pour les morts de la mer et du Sahara ?»  demande-t-il.

Un jardin d’Eden pour les morts et les vivants

Ce cimetière se veut être une sorte de jardin d’Eden  : « Je voulais leur faire un palais avec une oasis, leur dérouler un tapis de prières. Quand ils arrivent, l’odeur des cadavres est telle qu’il fallait pouvoir donner aux morts un autre air à respirer, qu’ils puissent sentir le jasmin jour et nuit »  dit-il.

Certes, cet espace est dédié aux morts mais c’est aussi un lieu pour les vivants.

Une porte traditionnelle du XVIIe siècle s’ouvre sur le « Jardin d’Afrique ». Des dizaines d’allées de céramiques peintes à la main conduisent à une salle de prières commune à toutes les religions.

Des bâtiments sont prévus pour faire des autopsies sur place. Elles permettent l’identification des dépouilles par le gène ADN afin de redonnent leur identité à ceux qui trouvent la mort en mer ou sur les routes de l’exil.

La symbolique du « jardin »

Cinq oliviers entourent le cimetière. Ils symbolisent les cinq piliers de l’Islam. Douze vignes représentent, quant à elles, les apôtres du Christ.

D’autres arbres ornent le jardin : des bougainvilliers « aux couleurs du sang du Christ » et des orangers amers afin de rappeler  « l’amertume de la mort» mais aussi le doux parfum des fleurs d’oranger.

Des arbustes odorants tels que le jasmin aux fleurs blanches évoquent la pureté mais aussi la force. Elles nous « parlent » d’amour et de paix. Des galants de nuits (ou jasmins de nuit) exhalent, dès que la nuit tombe, un parfum intense lorsque les fleurs s’ouvrent.

Les allées ressemblent à un immense tapis de prière. Elles soulignent la blancheur des sépultures. Des coupes, de couleur jaune et verte, placées sur les tombes, accueillent les oiseaux et recueillent l’eau de pluie. Banquettes et tables en céramique blanches attendent les familles mais aussi les croyants de toutes les religions qui désirent prier dans ce cimetière ou s’y recueillir.

Donnez-nous la grâce de pleurer sur nos frères noyés dans la méditerranée

C’est à Lampedusa que le Pape François fit sa première sortie du Vatican. Il y pria et pleura sur les milliers de réfugiés morts en mer et demanda à Dieu de nous donnez la grâce des larmes afin de ne pas devenir un jour, indifférents au drame de nos frères qui meurent sur les routes de l’exil.

Cette œuvre nous invite à réfléchir sur le vrai sens du dialogue interreligieux et à méditer ces phrases bibliques : « La terre brûlante se changera en lac, la région de la soif, en eaux jaillissantes… Là, il y aura une chaussée, une voie qu’on appellera « la Voie sacrée » … Les rachetés y marcheront » (Is 35, 7-9) – « … Voici une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le Trône … Ils disaient «  Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! » (Ap 7,  9 et 11). Parlant de son cimetière, Rachid Koraïchi aime à répéter « Les Nations unies sont ici ».

Pour conclure

Puisque nous venons de vivre un temps de dialogue avec nos frères musulmans, méditons ces deux phrases  : « On ne dialogue pas seulement pour apprendre à vivre ensemble mais pour vivre ensemble comme des chercheurs de Dieu » ( Benoît XVI) – : « Nous sommes sollicités par notre foi à rencontrer Dieu à travers l’autre. Ne nous contentons pas de connaître l’autre, mais essayons avec lui de faire quelque chose pour le monde » (Tareq Obrou – grand imam de Bordeaux).

Apprenons le dialogue constructif et prions pour ceux qui meurent en mer et sur les routes de l’exil, mais aussi pour tous ceux contraints de quitter leur pays dans l’espérance d’un avenir meilleur, et qui errent aux frontières de l’Europe.

Georgette

SourcesAfrica : GRIC (Groupe de Recherche Islamo Chrétien) du 05-08-2021 – Africanews et AFP du 9-06-2021

Illustration : Photo Pikist – Libre de droit

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