Sœur Anne Lécu, dominicaine et médecin, rédigeait en 2020, des « lettres » à l’intention de Marie de Nazareth. Elle les a réunies dans un livre afin que nous devenions des correspondants entre Terre et Ciel.

En ce jour de l’Annonciation, associons-nous à  sa requête :

« Pardonne-moi Marie, ce soir je t’écris tard. Une femme de la prison où je travaille est partie à l’hôpital pour surveiller sa grossesse. Inutile de te dire que j’ai pensé à toi. Elle est seule, son mari vit au-delà des mers, si tant est qu’il existe. Je lui souhaite de rencontrer quelques anges lors de son accouchement, dans la personne de celles et ceux qui vont l’aider à donner au jour l’enfant qu’elle porte.

Ce serait aujourd’hui, tu accoucherais peut-être là, dans ce lieu où l’on met les personnes pour qui il n’y a « pas de place » ailleurs, pour de multiples raisons que tu sais aussi bien que moi. Ces femmes sont tes sœurs, et du sein de Dieu où ta vie désormais se tient, tu les connais du dedans de leur cœur, tu sais la clarté du fond de leur être, ce lieu d’innocence qui ne peut être abîmé par rien, car il est le lieu de notre ressemblance au Créateur.

Elles peuvent avoir oublié cette innocence, l’avoir recouverte d’actions plus ou moins glorieuses, de délits et parfois même de crimes, cela je le sais bien, il n’empêche qu’il demeure en elles comme en chacun de nous un lieu immaculé, comme toi tout entière tu l’es, qui est leur identité la plus profonde, l’endroit où la Parole du Créateur peut être entendue et reçue, quoi qu’il arrive. Puissent-elles trouver des visiteurs qui leur parlent en ce lieu-là, et leur donnent à croire qu’Il existe : La naissance d’un enfant advient en ce lieu-là, je crois. Tu le sais, Marie, n’est-ce pas…

A en croire Luc, les premières paroles de l’ange sont une bénédiction : « Grâce sur toi, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi ». Il ne prononce pas d’emblée ton nom … J’aime à entendre dans cette première annonce sans adresse une promesse pour chacun de nous.

La grâce qui vient sur toi vient sur nous et sur l’humanité entière, et tu es toi, Marie la messagère de cette grâce à tous adressée. Le Seigneur est avec toi, et voilà qu’il est avec nous, comme son nom Emmanuel, prononcé du fond des âges par Isaïe le prophète, l’a promis. Avec toi, avec nous, avec tous, une fois pour toutes…

Je voudrais bien te parler encore, mais mes yeux se ferment. Je te confie la nuit de ceux qui ne peuvent pas ou ne doivent pas dormir, et la nuit de cette femme, partie accoucher dans la solitude. Prends soin d’elle et de ce petit qui va voir le jour dans la nuit ».

Extrait de À Marie – Lettre du 20 décembre – Anne Lécu.

Illustration : Wikimédia Commons – Vierge à l’Enfant de Marianne Stoke (1855-1927) Tempera sur huile (entre 1907-1908) – Wolverhampton Art Gallery – Angleterre – Domaine public.