Et la manne cessa de tomber (Js 5, 9a.10-12)

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La 1ere lecture de ce 4eme dimanche de carême, extraite du livre de Josué, relate l’arrivée des Hébreux en Terre Promise après l’esclavage en Egypte. Cet écrit est le premier livre des Prophètes dans la Tanakh (la bible Hébraïque). Il fait suite au Pentateuque (la Torah pour les Juifs et, pour les Chrétiens, l’ensemble des cinq premiers livres de la bible). Il se termine par la mort de Moïse.

 

Qui est Josué ? : Fils de Noun, de la tribu d’Ephraïm, il est né en Egypte à l’époque de l’esclavage des Hébreux. Son nom est Osée [Yasha en Hébreu (de Yasha qui signifie être sauvé, délivré)].  C’est Moïse qui lui a donné le nom de Josué : « Moïse donna à Osée, fils de Noun, le nom de Yeshuwa ou Josué en Hébreu  »(Nb 13, 16), [Yeshuwa signifie l’éternel est salut]. Il a été le témoin de la sortie d’Egypte des Israélites sous la direction de Moïse. Il devient son assistant et l’accompagne dans l’ascension d’une partie du Mt Sinaï. Avec onze autres explorateurs (tous chefs des fils d’Israël), il part en éclaireur au pays de Canaan. Avant de mourir Moïse lui impose les mains : «  Josué, fils de Noun, était rempli de l’esprit de sagesse, parce que Moïse lui avait imposé les mains(Dt 34, 9) et après sa mort,Dieu lui confie le soin de franchir le Jourdain et de conduire le peuple en Terre Promise : « Moïse, mon serviteur, est mort. Maintenant, lève-toi, passe le Jourdain que voici, toi avec tout ce peuple, vers le pays que je donne aux fils d’Israël » (Jos 1, 2).

 

Que raconte ce livre : Son auteur n’est pas connu. Il porte ce nom parce qu’il raconte la conquête du pays de Canaan sous la conduite de Josué. On peut le délimiter en trois grandes parties : La conquête du pays (chapitre 1 à 12) – Son partage (13 à 21) et la fin de la vie de Josué (22 à 24). Il rappelle que la fidélité de Dieu à ses promesses demande en retour un engagement du peuple à son égard. En effet, l’installation des Israélites au milieu d’étrangers ne connaissant pas Dieu comportait de nouveaux risques d’infidélité. *

 

Dans le texte de ce dimanche, les Hébreux ont traversé le Jourdain, ils y ont enlevées douze pierres (une pour chaque tribu d’Israël). Arrivés à Guilgal, à l’extrémité orientale de Jéricho, Josué les fait dresser afin que les Fils d’Israël se souviennent du passage à pied sec du Jourdain : « C’est à pied sec qu’Israël a passé le Jourdain que voici… Ainsi, tous les peuples de la terre sauront combien est forte la main du Seigneur, et vous craindrez le Seigneur votre Dieu chaque jour » (Jos 4, 22 et 24). C’est en ce lieu que se déroule, selon de désir de Dieu, la circoncision de la 2eme génération des Fils d’Israël nés pendant la longue errance dans le désert « Tout ce peuple sortie d’Egypte était circoncis, mais tout le peuple né dans le désert, pendant la route, après la sortie d’Egypte, n’avait point été circoncis » (Jos 5, 5).Le sens profond de la circoncision nous est donné par St Paul : « Nous qui sommes les vrais circoncis, nous qui rendons notre culte par l’Esprit de Dieu…ne plaçons pas notre confiance dans ce qui est charnel »(Ph 3, 3). Lorsque ce rituel est accompli, le peuple campe à Guilgal et y célèbre la Pâque : « Lorsqu’on eut achevé de circoncire toute la nation, ils restèrent sur place dans le camp, jusqu’à leur guérison… Les fils d’Israël campèrent à Guilgal et célébrèrent la Pâque le quatorzième jour du mois, vers le soir, dans la plaine de Jéricho »(Jos 5, 8 et 9). Josué insiste sur cette célébration parce que, désormais, elle commémorera deux traversées : la sortie d’Egypte et le miracle de la mer rouge et celle du Jourdain et l’entrée en Terre Promise. C’est ce que chante le psalmiste : « La mer voit et s’enfuit, le Jourdain retourne en arrière… Qu’as-tu, mer, à t’enfuir, Jourdain à retourner en arrière ? …Tremble, terre, devant le maître, devant la face du Dieu de Jacob »(Ps 113 A, 3-5-7). Pour les Hébreux, la mer est à la fois le symbole de la détresse et de la mort inéluctable. Mais, suite à l’expérience de la traversée de la Mer Rouge, où Dieu a ouvert un passage, elle devient également le lieu la puissance salvifique de Dieu. Les eaux évoquent alors l’abandon à Dieu, à Sa Grâce Divine. Les flots du Jourdain, torrent impétueux et tumultueux descendant de l’Hermon, représentent, quant à eux, toutes les tentations qui nous entraînent vers le mal et nous éloignent de Dieu. Son assèchement est un enseignement qui nous dit que, malgré les faiblesses et les fautes, Le Créateur fait cependant se lever le soleil sur tous. Rappelons-nous : après le Déluge, l’Arc en Ciel est devenu le signe de la miséricorde de Dieu : [« Oui, j’établis mon alliance avec vous : aucun être de chair ne sera plus détruit par les eaux du déluge » « Je mets mon arc au milieu des nuages, pour qu’il soit le signe de l’alliance entre moi et la terre » (Gn 9, 11 et 13) **

 

La seconde partie est brève. Elle nous dit qu’après la célébration de la Pâque sur la Terre Promise, après que les Hébreux se soient nourris des produits de cette terre, la manne cessa de tomber : « Le lendemain de la Pâque, en ce jour même, ils mangèrent les produits de cette terre : des pains sans levain et des épis grillés. A partir de ce jour, la manne cessa de tomber, puisqu’ils mangeaient des produits de la terre » (Jos 5, 11-12).

 

Pourquoi la manne cesse-t-elle de tomber ? Dans le livre de l’exode, il est dit que le peuple, après le passage de la mer, est tenaillé par la faim dans le désert. Regrettant les légumes qui se trouvaient à leur disposition en Egypte, il se met à récriminer. Le Seigneur annonce alors à Moïse que, du ciel, il va faire pleuvoir du pain. Chaque jour, les Hébreux devront prélever une seule ration quotidienne, sauf le sixième jour où ils seront autorisés à ramasser une double ration afin de ne pas porter atteinte à la sanctification du sabbat : « Le Seigneur dit à Moïse : « Voici que, du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous. Le peuple sortira pour recueillir chaque jour sa ration quotidienne, et ainsi je vais le mettre à l’épreuve : je verrai s’il marchera, ou non, selon ma loi. Mais, le sixième jour, quand ils feront le compte de leur récolte, ils trouveront le double de la ration quotidienne. »((Ex 16, 4-5). Au matin, découvrant quelque chose qui ressemble à du pain, ils demandent à Moïse ce que c’est «  Mân hou » d’où le nom de manne : [« Quand ils virent cela, les fils d’Israël se dirent l’un à l’autre : « Mann hou ? »qui signifie qu’est-ce que c’est ?). Moïse leur dit : « C’est le pain que le Seigneur vous donne à manger. »(Ex 16, 15) Ce pain,  qualifié de « pain de misère » : « Nous sommes dégoûtés de cette nourriture misérable ! » (Nb 21, 5), devient le pain des forts : « chacun se nourrit du pain des Forts, il les pourvoit de vivres à satiété » (Ps 77 (78) 25). Il est même qualifié de pain des cieux : « A leur demande, il fait passer des cailles, il les rassasie du pain venu des cieux » (Ps 104 (105) 40). Cet arrêt signifie qu’une nouvelle vie commence après les difficultés de la période du désert. ***

   

 

Malgré sa brièveté, ce texte, à quelques semaines de Pâques, est riche d’enseignements. En hébreu ancien, Josué a la même racine que Jésus ישוע, Iéshua. Il nous fait comprendre que notre baptême ressemble à la traversée du Jourdain, à l’entrée en Terre Promise. Nous recevons une seule fois ce sacrement qui nous introduit dans une « véritable terre de liberté » ! Quant à la manne, elle est un « type » d’Eucharistie. Dans les deux cas, il s’agit d’un secours offert par Dieu. Seul, l’homme ne peut se le procurer. C’est donc une grâce surnaturelle. Dans celui de l’Eucharistie, il s’agit d’une nourriture quotidienne et spirituelle que nous trouvons à la fois dans la Parole et dans le Pain Eucharistique. De la manne et de l’Eucharistie, St Augustin a dit : « La nourriture spirituelle était la même pour eux que pour nous » (Tractatus in Ioannem 26, 6, 12). Soulignons que « la figure eucharistique de la manne fait partie de la tradition commune de l’Eglise et de l’enseignement du Christ ».

 

Georgette

 

Sources :

* Chrétiens aujourd’hui.

** Marie-Noëlle Thabut, PSN et Retraite dans la ville : le passage du Jourdain

*** Marie-Noëlle Thabut

 

 

 

 

 

 

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