Homélie du 12 mai 2020 : « Je vous laisse ma paix »

Publié le

Mardi, 5ème Semaine du Temps Pascal

 

 

Homélie du Père Jean Delvolvé

Il y a bien longtemps que nous n’avons pas fait ce très beau geste au cours de la liturgie de la messe, se donner mutuellement la paix du Christ.

Ce geste arrive après la consécration, avant que nous communiions au corps et au sang du Christ. Ce n’est pas une simple formalité, une simple manière de se dire bonjour. Il signifie vraiment que nous nous donnons mutuellement la paix du Christ, que nous nous la transmettons, nous qui l’avons reçue dans notre cœur comme un don de Dieu le jour de notre baptême.

C’est l’occasion pour nous de nous interroger sur ce que signifie le don de la paix pour les chrétiens.

1. La paix du Seigneur

Aujourd’hui le Seigneur annonce dans l’Évangile le don de la Paix à ses disciples juste avant sa mort : « je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ».

Le Christ ressuscité donnera à ses disciples cette même paix du Seigneur lors de la première apparition : « la paix soit avec vous. » (Jn 20,19)

Le don de la paix n’est pas simplement une absence de conflit entre les hommes, l’absence de dispute dans les familles… La paix que nous offre le Seigneur est la paix profonde du cœur, fruit de la réconciliation avec Dieu. Ce n’est pas un hasard que le Seigneur attache le don de la paix au pardon des péchés dans l’Évangile selon saint Jean. Après avoir donné la paix à ses disciples, le Christ ressuscité leur donne le pouvoir de pardonner les péchés et souffle sur eux l’Esprit-Saint.

Cette paix qui n’est pas simplement l’indifférence aux passions, au sentiment de l’âme, comme le zazen asiatique. Mais c’est cette profonde paix de se savoir aimé et réconcilié avec Dieu.

Ce peut être le cas après une confession durant laquelle nous avons déposé le boulet de nos péchés aux pieds du Seigneur, et nous sortons avec une grande joie une paix profonde, la paix du Christ ressuscité, la paix des enfants de Dieu.

Avons-nous déjà fait cette expérience de cette paix profonde du cœur que le Seigneur veut ressusciter veut nous donner ?

 

2. La paix comme critère de discernement

Le pape François, en bon jésuite qu’il est, nous invite souvent à discerner les esprits, à discerner les motions intérieures de l’âme, c’est-à-dire à savoir discerner la voix de Dieu et « la voix du prince de ce monde », la voix de Satan, dont nous parle le Christ (dans l’évangile d’aujourd’hui.)

La paix et la joie sont les fruits de l’action de l’Esprit Saint dans notre âme. Au contraire de l’oppression, de la tristesse, de la haine qui sont le fruit de l’action du mauvais.

Une petite expérience personnelle m’a beaucoup marqué au seuil de ma vie d’adulte. J’avais depuis peu de temps mon permis de conduire, mes parents n’étaient pas à la maison. Je me suis permis d’emprunter la voiture de mon papa sans la ranger à la bonne place et surtout sans le lui dire. Ce qui est arrivé devait arriver, mon père a recherché sa voiture qui n’était pas à sa place habituelle. Il m’a interrogé et m’a passé un savon un peu humiliant pour un grand garçon en recherche d’indépendance.

C’est alors que j’ai eu un grand combat intérieur, je sentais le mauvais esprit qui ne poussait à m’enfermer dans la susceptibilité et la rancune envers mon papa. Je m’apprêtais à lui écrire une lettre lui disant toute mon amertume et mon sentiment d’avoir été humilié. Au fur et à mesure de l’écriture de cette lettre, à la place de la Paix, des sentiments d’oppression et de tristesse m’ont envahi.

J’ai donc décidé de la déchirer et de me réfugier dans l’église la plus proche. Je déposais ma peine auprès du Seigneur durant un quart d’heure, une demi-heure, une heure. Peu à peu à la place de ces sentiments de haine, une paix profonde du Seigneur m’a rejoint, ainsi que la conviction que le Seigneur m’invitait à pardonner et à prendre de la hauteur par rapport à cette petite friction familiale finalement bien commune.

Je suis ensuite reparti chez moi, et ai pu en reparler avec mon papa, avec une dose d’humour. Nous avons bien ri ensemble. Imaginez les conséquences graves de mon acte si j’étais allé au bout de ma lettre…

Ce matin, durant ce temps Pascal, demandons à l’Esprit Saint de venir descendre dans nos cœurs pour désamorcer toutes les attaques du mauvais.

Si cela fait longtemps que nous ne sommes pas confessés, n’attendons pas pour recevoir ce beau sacrement de la paix. Les prêtres sont disponibles dans les églises pour confesser. Marie mère de la paix, aide-nous à accueillir la paix de ton fils. Amen

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 14, 27-31a)

En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Je vous laisse la paix,
je vous donne ma paix ;
ce n’est pas à la manière du monde
que je vous la donne.
Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé.
Vous avez entendu ce que je vous ai dit :
Je m’en vais,
et je reviens vers vous.
Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie
puisque je pars vers le Père,
car le Père est plus grand que moi.
Je vous ai dit ces choses maintenant,
avant qu’elles n’arrivent ;
ainsi, lorsqu’elles arriveront,
vous croirez.
Désormais, je ne parlerai plus beaucoup avec vous,
car il vient, le prince du monde.
Certes, sur moi il n’a aucune prise,
mais il faut que le monde sache
que j’aime le Père,
et que je fais comme le Père me l’a commandé. »

– Acclamons la Parole de Dieu.

Plus de lecture...