Consentir à habiter ce monde tel qu’il est

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Comme Pierre, Jacques et Jean dans l’Evangile, nous aimerions parfois être « à l’écart, sur une haute montagne » : à l’écart de nos soucis et de nos luttes quotidiennes ; au-dessus de notre monde inquiet et touché par le mal sous toutes ses formes.

Nous aimerions parfois être en compagnie de Jésus, seuls avec ceux qui nous sont chers. Et nous reposer. Dire avec Saint Pierre : « Il est bon que nous soyons ici… dressons des tentes pour nous établir enfin dans la paix et la tranquillité. »

Nous aimerions voir le visage brillant de Jésus, être enveloppés de la nuée lumineuse de l’Esprit Saint, entendre la voix rassurante du Père.

Ces moments de transfiguration, il nous est donné de les vivre parfois, de manière fugace ou prolongée, à l’occasion d’un temps de prière, d’un pèlerinage dont on voudrait qu’il dure toujours, d’un temps de grâce en compagnie de personnes que l’on aime, d’un moment privilégié dans la nature…

Mais, comme dans l’Evangile, cette transfiguration ne dure qu’un moment. Avec Jésus, il faut redescendre de la montagne et revenir dans la plaine.

La plaine de notre vie quotidienne, avec ses lourdeurs, ses hésitations, ses fatigues et ses peines. La plaine de notre monde : ce monde tel que nous le connaissons, avec son histoire blessée, ses angoisses, son avenir incertain.

C’est là que Jésus nous attend, dans la plaine. Il ne nous attend pas dans un autre monde, dans un monde parallèle, un monde qui serait plus « spirituel ». Tant que nous sommes sur cette terre, nous devons consentir à vivre dans ce monde-ci, et pas dans un autre, qui n’existe pas, ou pas encore totalement.

Consentir à habiter ce monde tel qu’il est, l’accueillir, l’accepter, avec ses contradictions et ses sources de souffrance. Aimer ce monde tel qu’il est, même s’il nous révolte et nous déboussole ; même s’il nous inquiète et nous met en colère.

Aimer ce monde sans aimer tout ce qui est dans ce monde. C’est bien ce monde que Jésus a tellement aimé en venant Lui-même, en personne, l’habiter.

Nous devons accepter de partir de la réalité pour pouvoir avancer. Si nous partons à côté, si nous nous réfugions mentalement ou spirituellement dans un autre monde, nous n’arriverons nulle part. Il nous faut partir de là où nous en sommes, avec notre histoire individuelle et collective. Consentir profondément à être des habitants de ce monde qui est le nôtre.

Nous ne sommes pas encore totalement dans le monde de la résurrection, dans le monde où Dieu sera « tout en tous ».

Écoutons Saint François de Sales nous dire : « Pars d’où tu es, sinon tu n’arriveras nulle part ! » Prenons quelques instants pour accueillir notre monde, notre quotidien. Pour consentir profondément à habiter ce monde tel qu’il est.

 

P. Édouard George

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