Homélie du 3ème dimanche de l’Avent

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« Soyez dans la joie du Seigneur, soyez toujours dans la joie » (Ph 4, 5). Ce sont les paroles qui ouvrent notre messe ce dimanche, appelé d’ailleurs « dimanche de la Joie ». Mais comment être dans une joie véritable, une joie durable, qui ne passe pas quand les guirlandes et les lumières auront disparu ? Comment vivre la joie quand tout semble s’écrouler autour de nous ? Où trouver la vraie joie ? Laissez-moi vous raconter cette histoire découverte au Mali.

« Un jour, un homme était à la recherche de la joie. On lui dit qu’un vénérable sage pouvait l’aider. Il alla donc le visiter. Il fut accueilli aimablement. Après avoir servi le thé, le vieux sage lui révéla le chemin pour trouver la joie tant espérée :

C’est un village loin d’ici, tu ne peux pas te tromper, au cœur de ce village, tu trouveras trois petits commerces. Là, te sera révélé le secret de la joie.

La route fut longue. Le chercheur du bonheur traversa des déserts, des montagnes et des fleuves, jusqu’à ce qu’il arrive enfin au village en question. Hélas ! Dans chacun des trois commerces, il ne trouva comme marchandises que des rouleaux de fil de fer dans le premier commerce, des morceaux de bois dans le second et de petites pièces de métal dans le troisième. Fatigué et découragé, il sortit du village pour trouver quelque repos dans une clairière voisine.

La nuit venue, la lune remplissait la clairière d’une douce lumière. Tout à coup se fit entendre une mélodie sublime. De quel instrument provenait-elle donc ? Il se leva et marcha en direction de la musique. Lorsque, stupéfait, il découvrit que l’instrument si mélodieux était une cithare faite de morceaux de bois, de petites pièces de métal et de fils d’acier, c’est-à-dire exactement ce qu’il venait de voir en vente dans les trois commerces du village.

À cet instant, il comprit le secret de la Joie : il comprit que la joie est faite de la synthèse de tout ce qui nous est donné. Et que notre tâche consiste à assembler tous ces éléments de façon harmonieuse. »

Souvent, nous pensons que la joie se trouve ailleurs, dans une autre vie, dans une autre région, dans un autre monde. Non, la joie est là, toute proche de nous, dans notre propre vie, dans notre propre famille et dans ce monde, même s’il nous semble que notre vie est faite de petits riens, décousus, comme ces morceaux de bois, ces pièces de métal et ces fils d’acier. C’est en accueillant ce que nous avons, c’est en nous émerveillant de ce qui nous entoure, c’est en les rassemblant que la joie s’enracine dans nos vies.

Lorsque j’étais au Mali, pendant trois mois, pour apprendre le bambara, j’ai vécu au rythme d’une famille dans un village du Sahel, éloigné de plus de 100 km de routes goudronnées. Complètement immergé dans le quotidien de ce petit village, coupé de tout, sans réseau téléphonique. Je me souviens du dernier enfant de la famille qui m’accueillait, Abraham, 6 ans. Il n’avait presque rien : un bâton, et un grand couvercle d’un ancien pot en plastique qui lui servait de roue, et il pouvait jouer des heures au cerceau en étant pleinement heureux.

Souvent, nous pensons que la joie a déserté nos vies, parce que des évènements ont bouleversé nos vies, parce que nos vies ne se déroulent pas comme nous l’avions prévu, selon nos projets et nos calculs. Et pourtant la joie est là, discrète, mais réelle. Elle se trouve dans l’action de grâce de ce que nous avons reçu mais que nous n’avons peut-être plus aujourd’hui, elle se trouve dans le sens que nous pouvons toujours donner à nos vies chamboulées.

Je pense à Marie, que nous avons fêté cette semaine le 8 décembre dernier. Elle avait prévu de se marier à Joseph. Mais avant de vivre avec Joseph, voilà que le messager de Dieu lui annonce que l’Esprit de Dieu va venir sur elle et qu’elle va donner au monde un enfant, Jésus, le Sauveur. Comment Joseph va accueillir cette nouvelle ? Comment le monde va la regarder ? Comment va-t-elle se regarder ? Marie cependant accueille cette nouvelle, elle dit « oui », elle s’offre totalement et elle trouve dans ce don de sa vie, la joie.

La joie est tout proche de nous, elle est plus profondément encore dans cette expérience aussi de nous savoir aimé de Dieu : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis tout mon amour » (Lc 3, 22). Et donc quoiqu’il arrive, ce Seigneur, qui nous aime, est la source de notre joie.

Un poète jésuite, Gerard Manley Hopkins, raconte dans un de ces ouvrages, « la Grandeur de Dieu », la réponse pleine de grâce que fit un jour un enfant : « Mais dis-moi, enfant, quel est ton choix ; qu’achèterai-je pour toi ? – Père, ce que vous choisirez, je le préfère ». C’est la joie de l’accueil confiant de la vie. Le Seigneur ne peut pas vouloir notre malheur. Même si nous ne comprenons pas tout dans notre vie, nous prenons cette vie telle qu’elle vient, en la recevant de Dieu qui nous aime, en suivant le Seigneur, en nous donnant pour y faire jaillir sans cesse la vie.

 

 

 

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