Homélie 4ème dimanche de Carême

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La parabole du frère sclérosé

 

Cette parabole de Jésus, nous la nommons habituellement la « parabole du fils prodigue » : elle nous parle en effet de l’admirable retour sur lui-même du fils cadet qui, après « une vie de désordre », est capable de reconnaître son péché et de revenir chez son père. Nous la nommons également parfois la « parabole du père miséricordieux » : elle nous montre de façon éclatante la joie du père, qui accueille son fils sans le condamner et se réjouit par-dessus tout de son retour à la vie. Mais nous pourrions également l’appeler la « parabole du frère sclérosé », en référence à l’attitude du frère aîné, à la fin de la parabole, qui n’est pas un élément secondaire de l’histoire. En effet, la parabole est adressée « aux pharisiens et aux scribes qui récriminent contre Jésus » parce qu’il « fait bon accueil aux publicains et aux pécheurs. »

Dans l’Evangile, Jésus ne se scandalise jamais du péché des hommes, de leur « vie de désordre ». Il ne s’en étonne même pas : il nous connaît bien… Mais il y a une chose qui fait toujours réagir Jésus : c’est quand nous n’entrons pas dans la logique de la miséricorde divine, quand nous avons le cœur froid, le cœur sec, le cœur de pierre (le cœur « sclérosé »).C’est l’attitude exacte du fils aîné, qui est vraisemblablement la pointe de la parabole : il « se met en colère et refuse d’entrer », d’entrer dans la maison et dans la miséricorde du père vis-à-vis du fils cadet.

               ⇒ Quand ressemblons-nous à ce fils aîné ? Quand avons-nous besoin de conversion, pour que Dieu amollisse notre cœur sclérosé ?

 

1/ Quand nous n’arrivons pas à nous réjouir de ce que le Seigneur fait de beau dans la vie des autres et que nous sommes déçus par les dons que Dieu nous fait.

Nous ressemblons au frère aîné de la parabole quand nous jugeons que, par notre service fidèle et droit du Seigneur, nous méritons davantage l’amour de Dieu que les autres ; donc quand nous estimons que le Seigneur ne nous a pas assez comblé par rapport aux autres : « Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. »

Il est beau d’être « au service » du Seigneur, il est beau de « ne pas transgresser ses commandements », mais il est plus beau encore d’entrer dans une communion intime avec le Seigneur. Il s’agit en effet de ne pas être seulement dans une attitude de service, mais d’amitié, avec Dieu : « Toi mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi ». Cette relation d’amitié fait qu’on ne se scandalise pas de la bonté de Dieu envers les autres. On ne compare plus, car les biens du Seigneur sont infinis et il ne nous enlève rien quand il donne sa joie aux autres.Au contraire, on entre dans la joie du père, à chaque frère qui revient à la vie : « Il fallait bien festoyer et se réjouir. »

 

2/ Quand nous jugeons durement nos propres péchés, notre propre passé.

Le fils aîné qui se met en colère et refuse d’entrer dans la miséricorde et la joie du père, c’est aussi nous, lorsque, en nous-mêmes, nous jugeons durement une partie de notre passé, les erreurs que nous avons commises. Quand nous n’arrivons pas à accepter la miséricorde de Dieu pour nous-mêmes. Parfois, nous nous sentons indignes du pardon de Dieu, et nous sommes très durs envers nous-mêmes, quand nous pensons à notre vie, passée ou présente.Là aussi, notre cœur est « sclérosé », dur comme la pierre, non pas tant vis-à-vis des autres que vis-à-vis de nous-mêmes, car nous sommes aussi nous-mêmes le fils prodigue qui a pu s’égarer.

Demandons au Seigneur de convertir le frère aîné qui est en nous, ce cœur sclérosé qui n’arrive pas à se réjouir de ce que le Seigneur fait de gratuit, d’immérité, de miséricordieux, dans notre propre vie !

 Père Edouard George

 

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