Homélie du 10ème dimanche du temps ordinaire à Enghien

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« Où es-tu ? »

C’est la toute première question du Seigneur, qui se trouve au tout début de la Bible, juste après le récit de la création. Et cette question nous permet de mieux découvrir l’identité de notre Seigneur, en qui vous allez proclamer votre foi. Le Seigneur est avant tout Celui qui part toujours à notre recherche. Il est vraiment le bon berger, capable de laisser 99 belles brebis grasses pour aller à la recherche d’une toute petite brebis, car rien n’est petit aux yeux de Dieu. C’est donc le Seigneur qui fait toujours le premier pas, c’est lui qui nous tend la main, c’est lui qui nous cherche inlassablement. « Où es-tu ? »

Parfois, nous avons honte de nous-mêmes. Nos gestes, nos paroles ou nos silences laissent une grande tristesse en nous et un fort sentiment d’amertume. Si le péché procure parfois quelques instants de joie, il laisse ensuite une tristesse interminable. Par crainte des autres et de Dieu, nous nous cachons, nous nous renfermons sur nous. Nous avons tellement trahi l’Amour de Dieu, alors nous redoutons sa réaction. Comment va-t-il m’accueillir ? Le Seigneur, lui, ne se résigne pas à notre honte ni à nos cachettes. Inlassablement, il vient à notre rencontre : « Où es-tu ? » Par sa Parole, par sa miséricorde, par sa tendresse, il veut guérir en nous ce qui est blessé et cassé.

Parfois, nous sommes absents, absorbés par nos multiples activités et responsabilités. Nous courrons sans cesse derrière le temps, nous avons tant de choses à faire, tant de missions urgentes même dans l’Eglise. Et nous n’avons plus le temps pour un cœur à cœur avec Celui qui nous aime, pour un temps gratuit offert au Seigneur.  Alors, le Seigneur nous rappelle aussi l’urgence de prendre un temps avec Lui pour nous ressourcer, pour reprendre Souffle, pour vérifier si nous allons dans la bonne direction. « Où es-tu ? »

Parfois, nous sommes distraits dans notre prière avec le Seigneur. Physiquement, nous sommes bien là dans notre chambre devant notre crucifix, ou nous sommes bien là dans l’église, assis, debout ou à genoux. Mais notre pensée est à des kilomètres de là, et nous pensons à notre travail, aux personnes que nous allons rencontrer, ou aux nombreux soucis qui sont les nôtres. Alors, le Seigneur vient vers nous pour nous réveiller : « Où es-tu ? » Il nous permet de renouveler notre relation vivante et affectueuse avec le Seigneur.

Cette question est fondamentale et universelle. Où en es-tu dans ta vie, dans tes projets, dans tes relations ? C’est une bonne question à se poser régulièrement.

A cette question du Seigneur, « où es-tu ? », répond le cri du psalmiste, « des profondeurs, je crie vers toi »

Ce cri nous rappelle que si, il y a mille raisons en nous de désespérer, il y en a encore plus d’espérer, d’aimer la vie, de choisir la vie. Même au plus profond des trous profonds, il y a une espérance et cette espérance est plus forte que tout. « Du fond de la détresse, je crie vers toi ».

Quand tout s’écroule, quand rien, ni personne, ne peut nous aider, quand nous sommes vraiment dans les profondeurs de l’abîme, comme le dit ce psaume, alors ces paroles du psaume 130 sont d’une aide extraordinaire, c’est comme le coup de pied que l’on donne dans le fond de la piscine pour remonter vers la surface de l’eau, vers la lumière, vers l’air pour reprendre souffle. Ce Psaume a aidé tant et tant de personnes qui étaient « au fond de la détresse » qu’on devrait donner à l’auteur de cette prière le prix Nobel de la paix, celui de la paix intérieure, celui de la paix avec les autres, et celui de la paix avec Dieu.

S’il y a une chose à retenir de notre catéchisme, c’est ça : Nous pouvons compter sur Dieu même dans les situations les plus désespérées.

  • Même quand la détresse nous submerge, et que tout ce qui nous reste est de crier vers Dieu, il entend et il nous sauve.
  • Même si nous sommes coupables, hyper honteux de nos fautes, de choses irrattrapables et inexcusables, nous pouvons nous tourner vers Dieu et compter sur son aide, il pardonne et il nous aide à avancer.
  • Même si nous sommes dans les ténèbres, et qu’il nous semble que la lumière ne viendra jamais, aussi certainement que le jour finit bien par se lever, il est certain que Dieu finira par faire lever un jour nouveau dans la vie la plus souffrante.
  • Et même si nous sommes comme un esclave, nous dit enfin ce Psaume, ligoté par notre faiblesse, ou que l’on s’est vendu soi-même à ces terribles maîtres que sont l’habitude et la superficialité, Dieu peut nous libérer et nous rendre à nous-mêmes.

Tu peux compter sur Dieu, nous dit ce Psaume : espère son aide, attend sa présence, il est notre sauveur au sein de la détresse.

Oui, on peut chercher Dieu quand on est dans la détresse, nous dit ce Psaume. Mais ce Psaume ne parle pas seulement des situations de détresse. Ce Psaume nous aide aussi quand tout va assez bien. Il y a une astuce dans l’écriture de ce Psaume, la première phrase a deux sens possibles, très différents : elle peut être traduite soit par « Du fond de la détresse, je t’appelle » soit par « Des profondeurs, je t’appelle ». Cette deuxième lecture nous invite alors à entrer au plus profond de nous-mêmes, à descendre au plus profond de nos cœurs à la rencontre du Seigneur, à entrer au plus profond de l’existence, et c’est là quelque chose d’essentiel pour vivre vraiment.

Quand tout va bien, nous avons tous un peu tendance à nous laisser vivre, à rester ainsi à la surface des choses. Ballotés par les évènements de la vie, nous sommes menés par les choses de la vie plus que nous ne menons notre vie.

Ce Psaume nous invite à entrer dans les profondeurs, à nous poser cette question : qu’est-ce qui est profond dans mon existence ? Qu’est-ce qui est profond dans nos activités, dans nos projets, dans notre façon de voir la vie ? Ce Psaume nous invite à enraciner notre vie en profondeur. D’être comme un arbre vigoureux avec des racines qui s’enfoncent profondément en terre jusque dans les fentes du rocher. Cela donne une très grande force, on est alors capable de résister à des vents terribles, qui ne pourront au pire que casser quelques-unes de nos branches, mais ne nous jetteront pas à terre.

Creuser en profondeur, descendre au plus profond de nos cœurs, et construire nos vies sur Dieu, demeurer en Lui, dans sa présence, devenir son familier, « celui que fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère ».

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