Homélie de Mgr Stanislas Lalanne à la messe de la Pentecôte le 20 mai 2018

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Au matin de la Pentecôte, les apôtres étaient ensemble dans leur maison. Ils étaient incertains, saisis de crainte. Qu’allaient-ils devenir ? Qu’avaient-ils à faire ? Quel était l’avenir du message de Jésus ? Ils ne savaient pas…

Tout à coup leur maison est secouée et remplie comme par un coup de vent. Sur chacun se pose comme une langue de feu. Ce souffle et ce feu prennent possession d’eux. Au plus intime de leur cœur. Ils les poussent à sortir de leurs maisons, à parler, à donner leur vie pour l’Evangile. Avec la force de Dieu.

En ce jour de Pentecôte, nous accueillons nous-mêmes le don que nous fait Jésus, le don de l’Esprit. Pour chacun de nous se renouvelle le baptême dans l’Esprit Saint reçu par les apôtres au Cénacle. Il y a eu une première Pentecôte. Mais aujourd’hui encore descend sur nous le don précieux du Christ ressuscité qui marque le début d’une nouvelle création. En cette fête de la Pentecôte, l’Eglise répandue sur toute la terre célèbre la fête de sa naissance.

L’Eglise est le fruit précieux de l’Esprit Saint, ainsi que nous l’ont rappelé les Actes des Apôtres : « Tandis qu’ils se trouvaient tous ensemble dans le même lieu […] ils furent remplis de l’Esprit Saint et commencèrent à parler en d’autres langues. » C’est l’Esprit qui leur donne le pouvoir de s’exprimer ainsi. Et toutes les personnes présentes à Jérusalem ont pu entendre dans leur propre langue, dans leur langue maternelle, les grandes œuvres de Dieu annoncées par les apôtres. Et aujourd’hui ? Comment ce prodige se renouvelle-t-il malgré nos faiblesses et nos peurs ? La réponse nous vient de Jésus dans l’Evangile : « Quand viendra l’Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage en ma faveur. Et vous aussi vous allez rendre témoignage car vous êtes avec moi depuis le commencement. »  

Oui, l’Esprit Saint, que le Seigneur ressuscité a répandu sur l’Eglise au début de sa mission, il l’envoie dans nos cœurs aujourd’hui encore, afin qu’avec notre vie, transformée dans la sienne, nous puissions lui rendre témoignage. C’est une grâce que nous ne pouvons pas refuser. C’est un souffle de vie sans lequel nous ne pourrons pas vivre. Mais surtout, c’est le premier don que Jésus ressuscité a offert à ses disciples le soir de Pâques. Il nous l’offre aussi : « Recevez l’Esprit Saint. » Pour cela, l’Eglise nous offre ce don, déjà au début de notre vie, par le baptême, je pense aux dix jeunes baptisés ici hier soir, et plus spécialement encore par la confirmation. L’Eglise nous l’offre afin que, comme nous l’a dit saint Paul, nous puissions vivre de l’Esprit, marcher selon l’Esprit, nous laisser conduire par l’Esprit. Mais qu’est-ce que cela veut dire concrètement ?

Vous avez entendu, dans cette lettre aux Galates citée par le Pape, ce que produit l’Esprit en nous : « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, humilité, et maîtrise de soi ». En entendant l’énumération des fruits de l’Esprit, nous comprenons très bien qu’il ne s’agit pas d’une production de vertus humaines que nous serions capables de faire grandir par nos propres efforts ! Il s’agit d’un don que Dieu fait aux hommes, il s’agit de la grâce qu’il met en nos cœurs, pour faire avec les êtres que nous sommes, pauvres, pécheurs, faibles, fragiles et ordinaires, comme les apôtres, des disciples missionnaires :
–      capables d’aimer,
–      capables de porter la joie,
–      capables d’être des artisans de paix,
–      capables d’endurer avec patience,
–      capables de manifester la bonté de Dieu,
–      capables de bienveillance, de foi et d’humilité,
–      capables de maîtrise de soi.

Aucun de nous n’est capable de ces fruits, sinon par la puissance de l’Esprit qui l’habite. C’est le premier signe, le premier témoignage que l’Esprit rend à la puissance de Dieu à travers l’humanité…

Nous qui sommes faits de la même pâte que les autres, avec nos limites, nos faiblesses et nos péchés, nous devenons capables de suivre le Christ, d’aimer, de donner notre vie, de témoigner des merveilles de Dieu, de nous mettre joyeusement au service des autres.  C’est un vibrant appel que je vous adresse à écrire en lettres de chair et de sang, les actes des apôtres pour aujourd’hui.

Notre département du Val-d’Oise est à l’image du monde où ont vécu les premières communautés chrétiennes. Un monde éclaté dans de nombreuses cultures, terre de rencontre, Galilée des nations… Par le don de l’Esprit, Dieu transforme un groupe humain comme celui des douze apôtres, comme nous tous aujourd’hui, en un unique corps, l’Eglise, rendant témoignage au Christ, comme il le demande à ses disciples. Aucune fidélité à la parole de Jésus n’a pu détourner les apôtres de parler la langue de ceux à qui ils s’adressaient.

Chaque langue, chaque culture a le droit et le devoir de recevoir à sa manière la parole de Dieu et de lui répondre à sa manière. Le chrétien doit être trilingue. Au moins ! Il doit parler trois langues : sa langue maternelle, la langue de l’Evangile et la langue de celui avec lequel il parle. Quand je parle de la langue de l’autre, je parle bien sûr de sa culture, de son histoire, de sa tradition, de son environnement familial, social, culturel…

Aujourd’hui, j’aimerais vous faire entendre cet appel du Christ, un appel qui vous est adressé personnellement : « Vous aussi vous rendrez témoignage. » Cet appel du Christ n’est pas seulement un ordre. C’est une nécessité intérieure. Peut-on être amoureux sans que cet amour se voie ? Sans qu’on ait envie de parler ? D’en parler ?

C’est la force de l’Esprit Saint
–      qui a poussé les apôtres dehors,
–      leur a fait dépasser leurs peurs et appréhensions,
–      leur a soufflé les mots pour dire la tendresse de Dieu.

Vous avez entendu l’appel de François : « Vous deviendrez les témoins audacieux de l’amour de Dieu, dans un monde blessé et plus particulièrement aux périphéries de l’existence où d’innombrables femmes et hommes attendent la consolation du Seigneur. »

Alors, chers amis,
–      allez rencontrer ceux qui attendent une bonne nouvelle qui les concerne personnellement.
–      Allez rencontrer ceux qui n’ont pas trouvé de sens à leur vie et qui se demandent pourquoi vivre.
–      Allez rencontrer tous ceux qui crèvent de ne pas savoir aimer ou de ne pas se savoir aimés.

Allez, soyez ces témoins audacieux du Christ. Vous pouvez être fiers de l’Evangile, fiers de l’espérance qui vous habite. Nous l’avons entendu dans l’Evangile : c’est l’Esprit lui-même qui met en nos cœurs les pensées et les prières que nous devons adresser à Dieu. C’est l’Esprit qui met sur nos lèvres les paroles que nous devons nous dire les uns aux autres.

Chers amis,
–      en ce jour de Pentecôte où l’Esprit est répandu sur nous, et tout particulièrement sur les confirmands,
–      en ce jour où l’Esprit constitue son Eglise comme témoin et apôtre du Christ,
–      en ce jour où nous sommes appelés à écrire les Actes des apôtres pour notre temps, en lettres de chair et de sang,
rendons grâce à Dieu qui fait de nous des témoins de la vérité et des témoins de son amour.
Amen.

+ Mgr Stanislas Lalanne
évêque de Pontoise

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